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Si l'on croit que la culture de l'intelligence
ne convient qu'à un petit nombre d'hommes bien
doués, qui gouverneront ensuite les autres, alors
oui il faut enseigner mal, et enseigner vite ; et c'est
tant pis pour celui qui ne saura pas comprendre à
demi mot ; il apprendra, au cours de ses études,
le respect qui est dû à l'élite
; et cela suffit, dans un régime aristocratique.
A ce point de vue l'Université défie toute
concurrence ; elle possède l'art d'enseigner
mal ce qu'elle sait bien ; et ce n'est pas si facile
qu'on le croirait.
Mais si l'on considère que les esprits les plus
lents, et qui sont quelquefois les plus riches, sont
ceux qui ont le plus besoin de conseils et de leçons
; si l'on croit que des citoyens préparés
à la réflexion et à la critique
sont le trésor d'une démocratie, et si
l'on estime, d'après cela, que l'enseignement
est fait principalement pour ceux qui ne sont pas capables
de s'instruire tout seuls, alors,
il faut reconnaître que l'Université ne
nous en donne point pour notre argent.
Propos d'un Normand, 17 mars 1906
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